Merci pour
le «niet» russe


«Les grands accomplissements des grandes personnes restent avec nous même après leur mort».
«Merci pour le «niet» russe»: tel est le nom que porte le monument érigé par les Serbes à l'est de Sarajevo, en Bosnie, en hommage à Vitali Tchourkine et à son veto au Conseil de sécurité de l'Onu. Cette plaque noire à l'effigie du diplomate russe porte une inscription laconique, derrière laquelle on perçoit des choses plus grandes que la force de son caractère, son énergie, son courage et sa diplomatie brillante.
Ouverture du monument en hommage à Vitali Tchourkine
Il y a un an, Vitali Tchourkine, représentant permanent de la Russie à l'Onu, est mort subitement la veille de son 65e anniversaire.
«Il a consacré toute sa vie à la protection des intérêts de la Russie, a été sur les lignes d'avant-garde et a occupé les postes les plus difficiles.»

Piotr Ilitchev,
représentant permanent adjoint de la Russie à l'Onu

Retour sur le parcours d'un diplomate dont l'une des tâches était la défense de «la position russe sur les questions internationales les plus importantes» sur l'échiquier mondial.
«Ne pensez-vous pas que la catastrophe de Tchernobyl montre que l'URSS est au bord de la faillite?», avait-on demandé à Tchourkine. A quoi il avait rétorqué: «Ne vous semble-t-il pas que la catastrophe de Challenger montre que les États-Unis se trouvent au bord de la faillite?»
Le chef de la diplomatie russe Sergueï Lavrov avoue: « Nous traversions la vie côte à côte. »
Tous deux diplomates, leurs parcours professionnel avaient beaucoup en commun. « Au printemps 1990, nous avons été en même temps nommés vice-ministres, j'étais chargé de superviser l'Onu, lui, les Balkans, en plus d'être le représentant spécial du président russe pour le règlement des crises sur le territoire de l'ex- Yougoslavie », raconte M. Lavrov, qui rappelle que Vitali Tchourkine avait alors pour objectif d'obtenir de l'Onu une enquête objective sur les massacres de Markale, alors que plusieurs hommes politiques cherchaient à imputer la responsabilité de l'attaque aux Serbes.
Il a été ambassadeur à l'Onu pendant l'une des périodes les plus difficiles des relations russo-américaines, en faisant preuve de dignité et de sagesse.
Henry Kissinger,
ancien secrétaire d'État américain
«Je voudrais poser à monsieur l'ambassadeur des États-Unis la question suivante: avez-vous déjà trouvé des armes de destruction massive en Irak ou menez-vous toujours vos recherches? Washington ne menace-t-il pas de recourir à la force contre un autre membre de l'Onu, voire de le rayer de la carte?»
«Le plus étrange, selon moi, est l'intervention de l'ambassadrice des États-Unis qui a présenté son intervention comme si elle était une sainte. Souvenez-vous quel pays vous représentez! Souvenez-vous des «accomplissements» de votre pays avant de parler du point de vue de la supériorité morale. Quant aux responsabilités, je pense que l'histoire et Dieu les établiront»
Alors que le représentant britannique auprès de l'Onu avait pointé la responsabilité de la Russie dans la crise en Ukraine, son homologue russe Vitali Tchourkine a mis les points sur les « i » en conseillant à Londres de soulager sa conscience et de rendre les territoires annexés par le Royaume-Uni, qui sont nombreux.
«En ce qui concerne la position du représentant du Royaume-Uni, j'ai un conseil: rendez les Îles Malouines, rendez Gibraltar, rendez la partie que vous avez annexée de Chypre, rendez l'archipel des Chagos dans l'océan Indien, que vous avez transformé en énorme base militaire. Alors votre conscience sera un peu plus claire et vous pourrez parler d'autres choses.»
Le stress est incessant, tous les jours. Vous savez, le décalage horaire entre Moscou et Washington atteint huit heures. Il faut faire beaucoup de choses à New York: rédiger un discours présentant la position russe, envoyer à Moscou les informations concernant les autres pays, recevoir les instructions et assurer leur mise en œuvre. C'est probablement le travail le plus compliqué. Il est mené 24 heures sur 24.
Sergueï Ordjonikidze, ancien sous-secrétaire général de l'Onu, sur l'emploi du temps à l'Onu
«Au cours de plus de 10 ans, parfois dans des conditions extrêmement tendues, il a défendu fermement et de manière consécutive la prise de position russe sur les questions internationales les plus importantes, ce qui demandait des efforts immenses et une complète abnégation. Mais malgré les difficultés, il accomplissait brillamment ses tâches et ne connaissait pas la défaite.»

Vladimir Poutine sur la personnalité
de Vitali Tchourkine
Un an après sa mort, Vitali Tchourkine nous manque énormément ainsi que son charme, sa passion, avec lesquels il défendait les intérêts de son pays et son dévouement à l'Onu.
Stéphane Dujarric,
porte-parole du secrétaire général de l'Onu
«Vitali Tchourkine était très aimé par les citoyens ordinaires, ce qui est une chose très rare pour un diplomate. Selon lui, les gens le reconnaissaient souvent dans le métro de Moscou qu'il prenait lors de ses visites dans la capitale russe. La volonté de remercier le diplomate dont ils connaissaient si bien le visage prenait parfois des formes curieuses. Ainsi, un homme, accordéoniste professionnel, a promis dans le métro d'organiser un concert pour Tchourkine. Un autre, qui avait reconnu l'ambassadeur russe, l'a tout de suite invité au restaurant. Le diplomate a refusé mais cet homme a envoyé le lendemain une boîte de cognac daghestanais à la réception du Ministère des Affaires étrangères».
Olga Denissova, envoyé spéciale de Sputnik à l'Onu
Minute de silence à l'Onu en hommage à Vitali Tchourkine
«Cet homme n'a pas seulement résisté aux coups, mais aussi représenté par sa personne, sa volonté, son énergie, ses connaissances et son intelligence le meilleur de ce qui avait été accumulé et réalisé par la politique étrangère russe depuis des décennies. Il symbolisait la foi infaillible en la justesse de notre cause, de nos convictions.»

Sergueï Riabkov,
vice-ministre russe des Affaires étrangères
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